"Mommy" sortie au katorza du 24 Octobre 2014



Nos commentaires


Elise
Merci au réalisateur d'avoir permis des moments de grâce pour supporter l'insupportable... C'était beau, mais poignant...

Martine
J'ai détesté cette manière de filmer d'entrée de jeu. Je ne vois pas où était la grâce au milieu de ces propos orduriers.

Elise :
J'entends par là qu'il y a eu de véritables moments de beauté dans l'émotion : dans les temps de répits, de calme : la scène avec la chanson "On ne change pas" par exemple... Mais d'autres aussi... Des moments de bonheur simple, du quotidien, mais super bien filmé...
              
Bernadette : 
Excellent !
Criant de vérité. Rien à enlever... rien à ajouter...
Le drame de bcp de familles, monoparentales ou pas. Deux femmes magnifiques, qui tentent de réparer leurs blessures respectives... dans cette situation d'impuissance. Un échec "annoncé".
              
Fernanda
Quel dommage de s'être arrêté à quelques expressions fleuries !!!
En plus en canadien, elles passaient mieux...
" Le tas de M..." ce n'est pas le langage mais sont les actes... les institutions telles quelles sont devenues... la façon de faire taire la différence !!! Un film très fort, terriblement vivant, où la vraie "normalité" (la morale) est parfois l'apanage des fous... Est-il vraiment fou, de s'insurger contre ce "beauf" qui veut des faveurs sexuelles, contre une aide ? Est-ce un fou, quand il rejette l'asile qui le "défonce"... Le langage ordurier (pour moi à bon escient) est là pour appuyer la violence de ses souffrances... Un grand film !!!

Martine
Chacun ses limites. J'ignore l'opinion des associations de malades psychiques au sujet de ce film, j'aimerais, cependant la connaître en ... langage posé et serein. Alors que le Canada est pionnier en matière de traitement et d'accompagnement de ces cas-là. Mais retour au film.... pour les concernés. Ce que j'en ai vu m'a suffit et je parle de ce que j'ai vu qui a été insupportable, pour toute ma personne. Je ne prétends pas "débaaaatttre" le mot est lâché. Je veux juste donner mon impression . Merci de l'entendre. Ce qui ne m'empêche pas de lire les commentaires élogieux de ce film (Est-ce un film ?) c'est tout !

Dominique :
 Pour ma part cela faisait longtemps qu'un film ne m'avait autant bouleversée, les acteurs sont tous très justes dans leur interprétation, il y a des grands moments de bonheur et d'envie de vivre , et des images magnifiques je trouve. Le peu de moyens mis au service des personnes souffrantes ne me parait pas minimisé. Que l'on aime ou pas ce film ne peut laisser indifférent


Elise
Et le choix du format image... Curieux non ? En tous cas, ça marque notre inconscient...J'ai respiré avec Steve lorsque l'écran s'est ouvert, mais je n'ai pas vu quand il s'est refermé... je me suis juste sentie à nouveau oppressée...

Alain
Le désir de remettre du cadre n'est-il pas plus puissant que celui de le bousculer ?! Ce qui séduit dans le film c'est la volonté de donner un coup de boule à un monde accablant. On ne reprochera pas à Dolan d'avoir des comptes à régler aussi bien avec celui-ci, qu'avec sa famille ET avec les anciens. On sent qu'il a vu Godard, Cassavetes, qu'il a envie de faire sa nouvelle vague qu'il s'en amuse au point de se mimer lui-même en train de le faire. Effet de maniérisme. Le cadre resserré fonctionne peut-être comme un miroir et nous sommes dans ce cas de l'autre côté du tain, spectateur à compter les points.
L’adolescent qui se contorsionne est à notre ressemblance très actuel : nous cherchons plus que des règles, notre légitimité. Nous sommes entrainés dans le tourbillon de cette quête avec les deux autres personnages c'est la règle du film, on court sans arrêt après Steve au sens propre et figuré. Jusqu'à l'issue de suggérer au final en gel d'image l'explosion de la vitre comme en inversion par laquelle nous le regardons. La vitre de l'institution asilaire sur laquelle Steve veut dans sa fuite finale se projeter est aussi bien ce regard, cette ouverture par lequel nous suivons sa course vivante donc fatale. Donc ! mais ! et ! ou ? le bégaiement de Kyla assurait la jointure. L'adolescence c'est cette initiation personnelle à la jointure et sans cesse à la rejouer. Le fait que ça finisse mal n'est pas une objection à la vie. Mais la séparation est-elle une objection à l'amour ? ding dong sorti de la salle sonné.

Marie
Comme Myriam, le cadre est très fermé , sans décors et j'étais, comme dans une pièce de théâtre, témoin , dans l'intimité et la violence des personnages .( mommy et steve ) Kyla est le noeud central, ayant perdu un fils .
Excellents comédiens, musiques superbes et bon questionnement....???? sur la souffrance de l’autre.
un film vrai avec des phrases remplies d'images bien crues... c'est ça , aussi, la vérité, que l'on peut entendre .; suivant l'histoire et le vécu de chacun, bien sur .

Marie
Alain, je retiens ton mot " séparation". Ce film est justement, sur la fusion des 3 personnes .
Mommy doit être une mère , Steve doit couper le cordon et Kyla expliquer son bégaiement . ????
la plus belle preuve d'amour est la séparation vis a vis de ses enfants, pour les voir grandir.
              
Elise
"...Les plus handicapés ne sont pas ceux que l'on croie..." ça rejoint ce que dit Fernanda un peu plus haut, et c'est ce que j'ai ressentie très fort aussi...
Quant à savoir si "la séparation est une objection à l'amour..." : non bien sur, à condition qu'elle soit vécue avec compréhension des deux cotés... Sinon, elle peut être destructrice... Oups... C'est ce foutu changement d'heure qui inverse la parution de nos commentaires ?!!! Je voulais ajouter que j'ai été heureuse que l'on soit si nombreux : ça fait plaisir... Et merci à tous... C'est important de se sentir portée par le groupe, même inconsciemment, après un film pareil...

Alain
En parlant de miroir sans tain j'avais pensé à Cocteau, son film "Orphée" en particulier, en écrivant que Dolan devait sans doute l'aimer. Je viens de lire sa bio qui le confirme : "Xavier Dolan s'est fait tatouer, sur la jambe droite, une citation de Cocteau : « L'œuvre est sueur ». Ma réponse à Elise sur le format de l'image est le résumé d'un texte où je fais un parallèle entre amour et création - où l'amour est sueur aussi bien que l'accouchement jamais totalement achevé de soi en tant qu'adulte. Une autre sorte de détachement et de séparation. Couper le cordon va dans les deux sens et les nouveau-nés sont aussi des monstres, des détachés, qu'il faut apprivoiser et apprendre à aimer. Sans doute Diane a telle besoin de s'accoucher elle-même en tant que femme et aussi en tant que mère, de se détacher de la gamine et de l'ado qu'elle est.

Danielle
Bonjour à tous, vos commentaires me donnent envie de voir ce film,qui sans aucun doute me donnera beaucoup d'émotions. Je vais traquer son passage ici. La seule chose qui me manque de la Bottière c'est nos rendez vous cinématographiques réguliers et tellement enrichissants!!!
Je pense que même baigner régulièrement dans ce monde là, j'ai beaucoup à découvrir, à me nourrir de ces histoires.. Je vous donnerai mes impressions au moment voulu. 


Alain ( écrit plus en amont, certains passages sont intégrés plus haut) :
Le point de vue clairement empathique se déplace à parité entre les 3 personnages. Nous sommes renvoyés à notre situation d'adolescent, de parent et même à la situation d’adolescence de nos propres parents. La fêlure qui ouvre le film passe de l’institution à celle intérieure de chacun des personnages pour se prolonger dans la communauté qu'ils forment, famille recomposée idéale impossible,  jusqu'à la faire éclater. L'idéal finit comme il se doit en destruction quand il n'y a plus aucune possibilité de tiers. Ce tiers peut-être provisoirement incarné par chacun des trois, en aucun cas par une extériorité sans arrêt défaite dans le film : le voisin sympa de Diane  mère de Steve,  le mari insipide à peine fonctionnel de Kyla. Ou bien encore les tenants des diverses institutions qui ne sont faites que pour harceler et dont l’inhumanité cruelle renvoie à la critique des années 60-70 et à la révolte adolescente celle de la contestation étudiante de l’establishment. On notera qu'aucun des 3 personnages principaux ne compose de gaité de cœur avec les règles de la société, contrairement aux personnages secondaires, ce sont des rebelles.


L'absence d'extériorité c'est le défaut de la place traditionnellement révolue à l'autorité paternelle qui se prolonge dans celle de la société. Si ça "psychotique", c'est du fait que l'adolescent doit se coltiner cette place, dans l'injonction de prendre la place de l’objet désiré par la mère. Mais comment faire sa crise avec un parent lui-même en crise, être ado quand sa mère est une adUlescente (contraction d’adolescente et d’adulte) magnifique à hauts talons rouges dérisoires.  Avec ce répit dans la crise de voir Kyla sur Steve le mettre en repli de ce rôle impossible à tenir. C'est dans un même mouvement que la fêlure du gosse prise en charge par Kyla  s'étend et fait éclater leur communauté, sauf qu’on ne s’y attend pas, on ne sait d’où ça vient ça la travaillait elle la mère de l’intérieur. La folle c'est bien elle. Et ça en a rendu fou plus d'une et plus d'un, le délaissement en réalité comme au cinéma (au cinéma dans Les neiges du kilimandjaro par exemple ou dans Le gamin au vélo). Ce repli du gamin n'est qu'une parenthèse jusqu'à ce que ça se délite, sans quoi le film ne fonctionnerait plus : nous sommes entrainés dans le tourbillon de l'adolescent avec les deux autres personnages c'est sa règle, on court sans arrêt après lui au sens propre et figuré. Jusqu'à l'issue de suggérer l'explosion de la vitre par laquelle nous regardions Steve : le cadre resserré d’une bonne partie du film nous met dans la position d'un miroir sans tain, une position de spectateur impuissant, c'est l'intérêt. Le tiers et l'extériorité nous sont donc dévolues à nous spectateur c'est l’habileté du film. (La vitre de l'institution asilaire sur laquelle Steve veut dans sa fuite finale se projeter est ce miroir par lequel nous regardions sa course).

Ce n'est pas la première fois que la place du père exclu fait fonction de fabulation dans un film, on le voit aussi dans Good bye Lenin autre rapport à la mère. La musique d'accompagnement au piano de Mommy m'a fait pensé à celle de Yann Tiersen dans Good Bye Lenin, Xavier Dolan a-t-il vu le film. De la même manière Mommy  renouvelle que nous ne savons plus ou est le père, ni ce qu'il est dans une société dont on n'accepte plus les règles. On voit ça à l’œuvre même si c'est de façon différente dans "Léviathan" aussi bien que dans "Le retour" qui montrent le déclin de la fonction paternelle pourtant dans une aire géographique et culturelle différente. La question que pose pour moi le film c'est au stade où nous en sommes de notre civilisation, de ce qui peut bien faire autorité, c'est à dire extériorité ou si on préfère loi - et de quelle manière peut-on le faire advenir pour l'intégrer et l'aimer ? Un esprit me souffle une réponse personnelle à l’instant. 


Au niveau de la leçon de morale que je pourrai extraire la tendance libertaire – et d’apparence facile - se confronte à ceci qu’il faut faire un effort extraordinaire pour aimer - et que de ne pas essayer serait un véritable gâchis. Dolan physiquement me fait penser à un personnage de Tim Burton. On sent que la vie est adossée à une pulsion de mort, c’est-à-dire de création extraordinaire.  L’espérance que le bonheur doit être est au prix d’une exigence. La tension du film entre les personnages mais aussi interne à chacun d’eux et qui monte pour moi se résume à ça : essayer ! Ma relation comme  acte de création. Les plus handicapés ne sont pas ceux que l’on croie. Pas un personnage normal dans le film. Même Kyla qui sert de référent idéal. Tous handicapés et monstrueux. La façon dont Diane « dies » se décompose après que Kyla lui annonce son départ est bien jouée, une gargouille baroque de Burton là aussi.

Peut-on demander au cinéma d'être une maison de retraite 3 étoiles et demi pour veuves de classes assez moyennes ? Inconvenant ? Convenu par moment au contraire. Mais je reste sous le choc émotif. Malgré le  final post soixante-huitard d'idéologie anti-répressive anti-psy anti-establishment du genre Family life etc.. . Un peu grotesque si ce décors ne servait le drame et il le sert. Oui c'est un bon film. Après "Laurence Anyway" que nous avions aimé, je m'attendais à mieux. Dolan s'amuse avec ses personnages et nous le fait partager.  De très beaux personnages, féminins en particulier. Bien aimé la séparation de la mère et de la voisine. Dramatiquement excellent. Mais l'ado n'est pas mal aussi, surprenante la direction d'acteur. Au final ce qui séduit c'est la volonté de donner un coup de pied (ou de boule) à un monde accablant. Quant à notre époque, le désir de remettre du cadre n'est-il pas plus puissant que celui de le bousculer ?! C’est le danger en face duquel nous met Dolan en situant son action dans l’anticipation d’un avenir proche.  Idéologiquement et formellement peut mieux faire ... mais on ne lui reprochera pas d'avoir des comptes à régler, avec sa famille ET avec les anciens. On sent que Dolan a vu Godard, Cassavetes et même Loach, qu'il a envie de faire sa nouvelle vague au point de se mimer lui-même en train de la faire. Un effet de maniérisme et ou de postmodernité ? Le cadre resserré fonctionne comme un miroir et nous sommes de l'autre côté du tain un peu spectateur à compter les points. Que faisait Dolan pendant les révoltes étudiantes qui ont secoué le Québec ? Il nous manque du politique de partout, un nouvel angle, le film ne l'ouvre pas, pas plus que nous, l’adolescent qui se contorsionne est à notre ressemblance, trop actuel.



Danielle 
Très surprise, je ne m'attendais pas à un film aussi vif!!!!
Il pose de grandes questions.. mais il ne peut y avoir de réponse commune à tous..
Et accepter sa "propre" réponse demande du temps, parfois jamais...l'image, j'ai besoin de pisser montre bien l'horreur de cette décision...sans doute peut être la moins "pire"..
Un film qui montre aussi le cruel manque d'institutions, de tous les niveaux..
Il montre aussi combien le tout médical peut détruire.. Mais s'y opposer c'est une lutte sans fin, parfois un chantage.. Une lutte qui lorsque on gagne un petit bout, permet de faire déplacer des montagnes...mais dont on sort souvent épuisée.
Je n'aurai pas compris ou même vu le cadrage si vous n'en n'aviez pas fait part..
Un film que je vais recommander dans les lieux que je fréquente....car il montre qu'une mère ne peut aller plus loin sans se détruire ou détruire tout autour d'elle..
que l'humain a des limites qui sont certes insoupçonnables mais réelles..

Ce film me fait remonter des moments de vie affreux, mais pour autant voir se film ne m'a pas paru impossible.. Par contre en parler en sortant aurait été difficile.. Les jugements sont trop faciles ou terriblement durs quand on ne baigne pas dedans!!!
Mais comme certains bien inspirés.. vous disent .. « tu n'as plus à te plaindre!!! »

Alain
Merci Danielle pour ce beau témoignage. Par beau je n'entends pas "joli" et gentil mais au plus près de l'expérience personnelle, près du réel tout en prenant du champ, un peu de distance, du jeu. Qui permet de ne pas coller à la misère de la situation au contraire.
Juste un détail qui a son importance, les rapports des institutions à l'adolescent et sa mère sont caricaturaux dans le film. La caricature a ceci de particulier de faire ressortir la vérité en exagérant la réalité. Ce film sonne comme un avertissement : il se passe dans le futur et non dans le présent - dans un futur proche apprend-on en introduction. Il faut qu'il y ait un peu de fiction. Ce n'est pas un reportage, c'est une mise en scène qui sert les 3 points de vue diffractés des personnages principaux, nous voyons la situation évoluer à travers eux, avec leurs génies, leurs souffrances et leur contradictions, et leurs limites comme tu le signales    Content que tu aies rappelé le caractère vif du film qui correspond aussi bien à Dolan qu'à ses personnages. Le rythme du film épouse leurs tonalités. Il y a d’apaisement aussi bien par exemple avec Kyla.